Qui a mangé l’agneau-méduse OGM échappé de l’ INRA ?

0081435085151Comment un agneau OGM a-t-il pu atterrir dans l’assiette d’un Français ? C’est la question que tout le monde se pose après les révélations du « Parisien ». Rubis, agnelle génétiquement modifiée avec une protéine de méduse par l’Inra, est passée entre les mailles du filet pour se retrouver dans notre chaîne alimentaire. Est-ce vraiment un cas à part ?

L’Inra part du principe que, sur le plan scientifique, il ne faut rien s’interdire. Pour les besoins de la recherche, l’institut s’autorise à modifier génétiquement des animaux.

Suite à cet accident d’agneau-méduse, l’Inra se défend en déclarant qu’il s’agit d’un accident, d’une défaillance humaine, mais que la sécurité alimentaire et sanitaire est assurée.

J’espère que cette histoire est une exception car l’Inra est un organisme d’état qui devrait pratiquer le principe de précaution. Cette défaillance du système prouve que l’institut ne maîtrise pas totalement les risques de dissémination.

 

Le risque sanitaire est réel

L’Inra assure qu’il n’y a aucun risque sanitaire pour la personne qui a consommé cet agneau génétiquement modifié. J’en doute et je crains que l’avenir ne me donne raison.

Quand une personne ingurgite une viande OGM ou clonée, elle assimile aussi les bactéries qu’elle contient. Ces dernières ont la particularité d’être un excellent vecteur de transmission de gènes notamment au sein de la flore intestinale. Comme il a été prouvé dans la transmission des gènes de résistance aux antibiotiques entre l’animal et l’homme, les gènes contenus dans les bactéries présentes dans la viande OGM pourraient transmettre leur information aux  bactéries de la flore intestinale humaine.

De plus, l’épigénétique, qui est l’étude des changements de l’activité des gènes en fonction des facteurs  environnementaux, nous apprend qu’une modification même minime du milieu intérieur peut provoquer l’expression de certains gènes restés jusqu’alors silencieux.

 

Un agneau modifié dans son assiette, c’est possible ?

C’est déjà une réalité pour les poulets et les saumons génétiquement modifiés qui arrivent dans nos plats cuisinés, dont les matières premières ont été importées et dont l’origine n’apparaît pas sur l’étiquette.

Alors pourquoi pas demain pour l’agneau ou le bœuf ?

Il y a peu, je suis tombé sur cette émission de M6 intitulée « Les chefs contre-attaquent » et dans laquelle on voyait un panel de grands chefs s’étonner de constater que 85% du contenu du frigo d’un ménage français était d’origine inconnue. On s’aperçoit en effet que sur les étiquettes des produits industriels transformés – plats cuisinés, conserves, etc –, les industriels ne donnent jamais la provenance de chacun des ingrédients puisqu’ils n’y sont pas contraints.

Ce n’est pas parce qu’une saucisse est estampillée « saucisse de Toulouse » qu’elle vient de France. Les ingrédients peuvent provenir du Brésil ou des USA – où les OGM sont autorisés – et être simplement assemblés en France.

Alors, retrouver demain un agneau génétiquement modifié dans son assiette, cela pourrait être possible.

 

La question du passeport de l’animal

Aujourd’hui en France, il est possible de consommer à son insu de la viande de clone ou de descendant de clone. Avec la généralisation de vente de paillettes de sperme venues des quatre coins du monde, une vache peut très bien être inséminée et donner naissance à un veau dont le père est un clone.

Le problème, c’est que l’éleveur sélectionneur n’a aucune obligation de signaler qui est le père de l’animal. Même si toute bête dispose d’un passeport qui permet de l’identifier, la case précisant l’origine du père est optionnelle. Et l’éleveur a plutôt intérêt à ne pas préciser ce genre d’information. Sans obligation de déclaration, sans suivi ni sanction prévue, la traçabilité du clone se perd, il devient un animal ordinaire non détectable et pourra se retrouver sur le marché européen comme n’importe quel autre pour finir sa course dans notre assiette. C’est ce type de faille qui a sans doute permis à cet agneau-méduse d’entrer dans un abattoir sans éveiller le moindre soupçon.

 

La transparence sur l’étiquetage devrait être une priorité

Le problème dans le secteur de la viande, c’est l’omerta. Tant que le lobby agro-alimentaire empêchera au consommateur d’avoir une traçabilité des aliments qu’il mange, nous ne serons pas à l’abri. Toute denrée alimentaire devrait être munie d’une étiquette précisant l’origine de l’aliment, son mode de culture ou d’élevage et même le nom de l’agriculteur. La transparence est la base d’un État démocratique, celui qui nous permettra de préserver notre futur.

Pour éviter de manger à son insu de l’agneau ou tout aliment génétiquement modifié, il n’y a qu’une manière de faire : il faut consommer exclusivement des produits en circuits courts, des aliments dont on connaît la provenance (qui les a produit et comment ?) et éviter les intermédiaires qui induisent une perte d’informations.

Les consommateurs ne pourront choisir librement ce qu’ils consomment que lorsqu’ils auront une information claire sur les produits mis en rayons.

Cela devrait être le cheval de bataille des services de la protection des populations.

 

 

Cet article a aussi été publié dans une tribune de l’Obs.